L’expérience se déroule dans une petite caravane. Comme une réelle invitation à un voyage musical, elle joue à la fois de sa représentation de liberté, d’exploration des grands espaces et de l’intimité très singulière qu’elle provoque. Le spectateur vit l’expérience du concert dans la caravane en compagnie de l’artiste tandis que les passants peuvent entr’apercevoir l’intérieur à l’aide d’une seule ouverture. Ils deviennent alors légèrement voyeurs de la performance, aiguisant l’envie et la curiosité, mais sans jamais rien entendre.

 

L’intérieur de la caravane est humble. L’espace est restreint. Le spectateur frappe à la porte. La pianiste l’invite à s’asseoir à table et lui lit un texte issu de la partition de la pièce qu’elle va lui jouer ensuite. Ce sont des recommandations du compositeur destinées à la musicienne: “…Viser à écouter aussi activement et aussi délicatement que possible. Il est probable que vous fassiez des «erreurs», mais si votre manière d’être est sensible, réfléchie et critique, il n’est pas possible de percevoir de manière incorrecte…”. Ce texte, la pianiste l’a légèrement remanié afin de pouvoir à son tour le diriger vers le spectateur, créant ainsi rapidement une vraie complicité et une responsabilité commune. La lecture du texte fini, l’interprète se dirige vers le piano et invite le spectateur à s’asseoir à côté d’elle. Elle lui demande de lui tourner les pages. La pianiste joue la pièce Collector du compositeur Charlie Sdraulig. Cette pièce pour piano est une chorégraphie des mains découvrant le clavier comme un paysage sonore. La partition n’est pas complètement définie, elle contient des règles de jeux qui obligent l’interprète à s’adapter en permanence à l’acoustique, au piano et à la morphologie de ses mains. La réalisation est à chaque fois différente. Dans cette pièce, le compositeur dévoile l’histoire intime de l’interprète avec son instrument et saisit le geste de l’instrumentiste qui tente, dans sa fragilité, de ne faire qu’un avec le piano. L’auditeur est assis tout près. Un jeu de miroir se créer entre les deux protagonistes. La musique se termine et la pianiste convie son invité à quitter les lieux.

 

Caravane, dans une grande intimité, évoque l’humilité nécessaire à la notion de découverte. Celle de la pianiste, comme celle du spectateur.